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Garantie d’emprunt à ATOS

Délibération :


Délibération ATOS
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Intervention de Bruno GOUA :


Nous aimerions que cette délibération soit reportée au mois prochain. Dans le cas contraire nous nous abstiendrons.


Depuis plusieurs mois, Atos, groupe informatique aux 100 000 employés et aux 10 milliards de chiffre d’affaires, est dans la tourmente, dans une dégringolade à forte pente. Le 26 mars, Atos est entré en procédure de conciliation amiable avec ses créanciers. Le 9 avril l’objectif a été annoncé : effacer 4,8 milliards de dettes, lever 1,2 milliard de liquidités.


Atos, gère, entre autres, les services de la carte Vitale, des pièces d’identité, de la CNAM, de l’Urssaf, de FranceConnect, du logiciel des compteurs Linky ou encore du système de régulation SNCF. Atos pilotera aussi cet été toute l’infrastructure numérique des JO.


Le groupe intervient dans le contrôle des centrales nucléaires françaises, ses supercalculateurs servent à la simulation des essais (nucléaires). Autrement dit, l’entreprise occupe une place essentielle, stratégique.


Atos est donc trop gros pour mourir, trop sensible. L’état vient de lui concéder un prêt de 40 millions d’Euros, en échange d’un droit de regard sur un éventuel repreneur, voire une option de nationalisation.


Comment en est-on arrivé là ? Et pourquoi des alertes n’ont-elles pas fonctionné avant ?

Thierry Breton a été à la tête d’Atos de 2008 à 2019, des années d‘acquisitions à marche forcée. A l’écouter, tout allait bien lorsqu’il est parti, l’avis des successeurs sur ses investissements est plus mitigé. Tout allait bien pour lui en tout cas, puisque celui qui allait devenir commissaire européen a cédé en partant ses 104 734 actions Worldline en plus de ses 579 705 actions Atos : 45 millions d’euros bruts, une vingtaine de millions après impôt. Sans compter sa retraite chapeau financée par le groupe, 711 000 euros par an selon le Canard enchaîné.


Thierry Breton a été nommé Commissaire européen sur proposition du gouvernement dirigé alors par Edouard Philippe, le même Edouard Philippe qui a rejoint le conseil d’administration d’Atos en octobre 2020, alors qu’il était maire du Havre ; Conseil qu’il a quitté en mai 2023. Des liaisons dangereuses. L’homme qui prêche la rigueur budgétaire s’exonère de cette vertu : en 2022, sa présence au conseil d’administration d’Atos lui a rapporté 70000 Euros. En plus de ses indemnités de maire et de président d’agglomération. C’est beau la rigueur.


Lors du dernier conseil régional du 28 mars, la Région a voté une garantie d’emprunt. Bruno Retailleau, que je ne cite pas souvent, a dit : « l’entreprise était mal gérée ». Avant de présenter cette délibération au conseil, la Présidente de région, Christelle Morançais avait joint Bruno Lemaire, le Ministre de l’économie, pour qu’il la rassure sur cette garantie d’emprunt à haut risque, pour qu’il lui assure que l’état pompier ne lâchera pas Atos.


En effet,  S&P Global Ratings a abaissé jeudi dernier la note de crédit du groupe de « CCC » à « CCC-« , tout en l’assortissant d’une perspective négative. Les CCC indiquent un risque très important de non remboursement, la note D traduit une situation de faillite de l’emprunteur.


Le mercredi 10 avril 2024, les commissions des affaires économiques et des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ont entendu les dirigeants d’Atos, les ont interrogés sur la situation et les perspectives du groupe Atos. Le mot nationalisation a été évacué, le prêt de 40 millions est un signal fort. L’état pourrait prendre une participation minoritaire, avec éventuellement la présence d’administrateurs.


Sur ce dossier il est souvent question de souveraineté, on peut se demander comment et pourquoi tant de services stratégiques ont été confiés à une même société, sans contrôles. Doit-on se résoudre une nouvelle fois à une socialisation des (lourdes) pertes après une privatisation des (énormes) profits ? Dans l’indifférence générale, dans la lassitude, l’habitude ? Les salariés ne sont pas responsables de la mauvaise gestion de leurs dirigeants, doivent-ils craindre une vente à la découpe du groupe, avec la casse sociale que cela comporte ?


Les rapporteurs appellent à une entrée durable de l’État au capital, ils présenteront leurs conclusions finales le 30 avril. Avant la lecture de ce rapport, par manque de visibilité, alors que les incertitudes sont nombreuses, il nous paraît irresponsable d’engager la garantie de la collectivité, voici pourquoi nous demandons un report de cette délibération.



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